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Brèves en Pharmacovigilance
Numéro 5, mars -avril 2002

SOMMAIRE
Editorial

Céphalées induites par abus de médicaments symptomatiques anti-migraineux
Littérature
Kava Kava et atteintes hépatiques
Addiction aux jeux et maladie de Parkinson
A suivre…
Naltrexone et sevrage
Préparation colique à base de phosphate sodique et troubles hydro-electrolytiques
Questions
Metformine et produits de contraste iodés
Troubles du rythme cardiaque et association de neuroleptiques : modifications du libellé
Observations
Buflomédil et dysfonction sinusale
Patch à la nicotine et allergie cutanée

Ont participé à la réalisation de ce numéro :
C. Bensoussan
J. Caron
E. Couderc
J. Dekemp
M.Delannoy
S. Gautier
G. Monkam
S. Mutel
T. Ouk
J. Pamart

Editorial :
Quand les antalgiques donnent des céphalées …
Les « céphalées par abus d’antalgiques » sont une pathologie fréquente,invalidante, socio-économiquement coûteuse, mais encore largement sous-évaluée. Selon les critères de l’International Headache Society (IHS), il s’agitde céphalées chroniques évoluant au moins 15 jours par mois, depuis aumoins 3 mois. Elles résultent de la surconsommation des « antalgiques »,incluant tous les médicaments qui soulagent rapidement les céphalées. Lediagnostic est basé essentiellement sur les données de l’interrogatoire, aprèsavoir éliminé une cause organique. Le point de départ est le plus souvent unemigraine vraie dont les crises deviennent de plus en plus fréquentes,secondairement associée à des céphalées de tension intercritiques, quiaugmenteront également en fréquence et en durée. Le patient ne différenciealors plus les céphalées originelles (migraineuses) des céphalées intercritiques(de tension), entraînant insidieusement une automédication quotidiennecompulsive et souvent anticipatoire, parfois favorisée par d’éventuels facteurspsycho-sociaux. La prise médicamenteuse est en réalité responsable de cescéphalées tensives intercritiques, dites de rebond. Il en résulte un syndromecéphalalgique auto-entretenu surajouté à la symptomatologie initiale, résistantaux traitements symptomatiques et prophylactiques, avec une réellepharmacodépendance physique (céphalées de rebond, phénomène de toléranceamenant à des doses croissantes) et psychique. Tous les antalgiques sontconcernés, y compris les triptanset la prise de paracétamol ou d’aspirine àpartir de 1g/jour. L’ergotamine, la dihydroergotamine et les antalgiquescombinés (associés à la codéine, au dextropropoxyphène et/ou la caféine) ensont néanmoins les principaux responsables. La physiopathologieet lesmécanismes pharmacologiques de ces céphalées induites restent bienmystérieux. A ce jour, il n’a pas été démontré que ces céphalées pouvaientsurvenir chez des patients algiques chroniques autres que céphalalgiques quiabusent d’antalgiques. La seule et indispensable solution curative est lesevrage, avec arrêt de tous les médicaments symptomatiques antimigraineux.Les nombreux protocoles médicamenteux utilisés pour soulager ces patientssont mal évalués et susceptibles d’induire une nouvelle dépendance. C’estdonc souligner l’importance de la prévention, basée sur l’information etl’éducation du patient céphalalgique, où médecins et encore plus pharmaciensdoivent jouer un rôle déterminant.
Rev Neurol 2001 ;157 :10,1221-1234
Brev Pharmacovig 2002 mars-avril; 5 1
Brèves de la Littérature
Pathological gambling in Parkinson disease : a behavioral manifestation of pharmacologic treatment ? Mov Disord, 2000 ;15(5) :869-72.
Kava Kava et atteintes hépatiques
Le kava (ou kawa ou kava kava ou Piper méthysticum) est une plante « médicinale » originaire des îles de Polynésie occidentale, réputée pour ses propriétés sédatives et hypnotiques. Initialement utilisée à Tahiti et en Nouvelle Calédonie selon un rituel précis, le kava est devenu une plante « à la mode » en Europe, où il s’est vendu sous forme de compléments alimentaires (alicaments) dans l’indication du traitement du stress, de l’anxiété, de l’insomnie et du syndrome prémenstruel.
Pathological gambling in patients with Parkinson’s disease. Clin Neuropharmacol 2001 ;24(3) : 170-2.
A suivre…
•La naltrexone (REVIA®, NALOREX®) est unantagoniste des opioïdes au niveau des récepteurs μdu système nerveux central et périphérique. Elle estutilisée comme traitement de consolidation aprèssevrage chez les patients toxicomanes aux opioïdes ettraitement de soutien dans le maintien de l’abstinencechez les patients alcoolo-dépendants. Cependant, lesrésultats d’une récente étude multicentrique, réaliséeen double aveugle contre placebo chez 627« veterans » américains ne semblent pas confirmerl’intérêt de la naltrexone dans cette dernièreindication.
Naltrexone in the treatement of alcooldependance. NEJM 2001 ;345 :1734-39.
•Les solutés buvables pour préparation colique à basede phosphate de sodium (FLEET® phospho-soda)peuvent induirent des troubles hydroélectrolytiquespotentiellement graves (hypernatrémie,hypokaliémie, hyperphosphorémie et hypocalcémie),des déshydratations, des insuffisances rénales aiguëset des acidoses métaboliques. Certains patients sontplus à risque de présenter ces effets indésirables,notamment les personnes âgées, les insuffisantsrénaux, les patients atteints de maladie cardiaqueet/ou digestive, de diarrhée, de vomissements et ceuxsous diurétiques. Chez ces patients, la Food and DrugAdministration recommande dans ces conditions, dene pas dépasser la dose 45 ml/jour d’une tellesolution et la réalisation d’un contrôle plasmatique dela fonction rénale et des électrolytes avant et aprèstraitement
Communiqué de la FDA, septembre 2001.
Une trentaine de cas d’atteintes hépatiques graves (hépatite, cirrhose, insuffisance hépatique) survenues chez des consommateurs de kawa ont été notifiés en Allemagne et en Suisse, dont une ayant entraîné un décès et quatre ayant nécessité une transplantation hépatique. L’AFSSAPS a donc suspendu la délivrance et l’utilisation à des fins thérapeutiques des produits et préparations contenant du kawa, à l’exception des médicaments homéopathiques de dilution supérieure à 5 CH. De même, le kawa ne peut plus être utilisé dans l’alimentation.
Communiqué de presse Afssaps du 09/01/2002
Addiction aux jeux et maladie de Parkinson :
De nombreux troubles psychiatriques peuvent survenir au cours de la maladie de Parkinson, mais l’apparition d’une addiction au jeu (« pathological gambling ») n’avait jusqu’à présent pas été décrite. Deux articles récents, publiés à un an d’intervalle, relatent des épisodes de comportement addictif vis à vis des jeux, en particulier d’argent, survenant chez des patients sans antécédent psychopathologique addictif ou impulsif, et traités par lévodopa pour une maladie de Parkinson. « Le jeu pathologique » est un trouble du contrôle de l’impulsivité, se caractérisant par une incapacité à résister à l’envie de jouer malgré les conséquences socio-professionnelles potentielles. Les patients parkinsoniens souffrant d’une addiction au jeu présentent souvent 2 caractéristiques : une maladie ayant débuté à un âge relativement jeune et la présence de fluctuations motrices. Ces effets indésirables observés chez des patients atteints d’une maladie de Parkinson et traités par lévodopa, pourraient être lié à une augmentation anormalement élevée des taux cérébraux de dopamine induisant une sur-stimulation des récepteurs dopaminergiques centraux.
Vous avez rencontré des effets indésirables semblables, notifiez-les au Centre de Pharmacovigilance
… Brev Pharmacovig 2002 mars-avril; 5 2
Vos questions au CRPV
Cette recommandation n’est en fait passcientifiquement justifiée. En effet, la demi-vied’élimination courte de la metformine (1,5 à 6heures) et l’apparition retardée de l’insuffisancerénale, 24 à 48 heures après l’injection de PCI,permet d’interrompre la metformine beaucoup plustard. La procédure actualisée est donc de suspendrele traitement juste au moment de l’examenradiologique et de ne le reprendre, en l’absence decomplications, que 2 jours après. En effet, la grandemajorité de la metformine a alors été éliminée et lerisque d’acidose lactique, lié à l’accumulation demetformine, est dans ces conditionsconsidérablement diminué.
Interaction : produits de contraste iodés(PCI) et metformine
Jusqu’à présent, lorsqu’un examen radiologiqueavec injection de produit de contraste iodé (PCI)était nécessaire chez un patient traité parmetformine, il était recommandé d’interrompre cetraitement 48 heures avant l’injection pour ne lereprendre que 2 jours après. Cette précaution visait àéviter la survenue d’une acidose lactique favoriséepar une accumulation de metformine secondaire àune insuffisance rénale ayant pu être provoquée parle PCI.
Neuroleptiques donnant des torsades de pointes* (à l’exception du sultopride)
sultopride
Sparfloxacine,
Pentamidine,
Halofantrine,
moxifloxacine
Autres médicaments donnant des torsades de pointes**
Neuroleptiques donnant des torsades de pointes* (à l’exception du sultopride)
Association déconseillée
Contre-indication
Association déconseillée
Association déconseillée
Sultopride
Contre-indication

Association déconseillée
Contre-indication
De la même façon, l’association d’un neuroleptiquetorsadogène à tout autre médicament torsadogène estune association déconseillée. Subsiste néanmoins uneseule exception, celle du sultopride qui reste au niveaude contre-indication avec la plupart des médicaments« torsadogènes » et au niveau d’associationdéconseillée avec l’halofantrine, la moxifloxacine, lapentamidine, la sparfloxacine. Ce niveau de contrainteavec ces produits étant motivé par l’absenced’alternative thérapeutique.
Depuis longtemps, la littérature rapporte laresponsabilité de plusieurs neuroleptiques dans lasurvenue de troubles du rythme ventriculaire ou demort inattendues et inexpliquées. Ces effetsindésirables ont été confirmés pour certainsneuroleptiques par de rares études épidémiologiques.
(1) amisulpride, chlorpromazine, cyamémazine,dropéridol, halopéridol lévomépromazine,pimozide, sulpiride, sultopride, tiapridethioridazine, trifluopérazine, (source : livretinteractions médicamenteuses du dictionnaireVidal®)
Drug Safety 2000 ; 23 (3) : 215-228
L’Encéphale 2000 ; XXVI : 62-7
Am J Psychiatry 2001 ; 158 (11) : 1774-1782
Lettre aux prescripteurs du 21 déc 2001 ;www.afssaps.sante.fr
Associations de 2 neuroleptiques« torsadogènes » : modification du libelléd’AMM
Beaucoup de psychiatres nous ont interrogés surles possibilités d’association de neuroleptiquestorsadogènes. L’AFSSaPS, après une enquête depharmacovigilance a établi en 1999 une liste de12 neuroleptiques susceptibles de prolongerl’intervalle QT et d’entraîner un risque detorsades de pointes en clinique (1). Uneinformation avait été ajoutée dans lamonographie de ces neuroleptiques dontl’association avait été dès lors formellementcontre-indiquée. Dans la pratique, il est apparuque certaines situations cliniquesexceptionnelles exigeaient la co-prescription deneuroleptiques torsadogènes nécessaires àl’obtention d’une efficacité thérapeutique ouqu’une modification de ce type de traitementpouvait être préjudiciable à l’équilibre dupatient. C’est pourquoi, l’association de deuxneuroleptiques pouvant entraîner destorsades de pointes n’est désormais pluscontre-indiquée, mais reste déconseillée. LesRMO recommandent cependant toujours leurutilisation en monothérapie. Brev Pharmacovig 2002 mars-avril; 5 3
Brev Pharmacovig 2002 mars-avril; 5 4
Observations
Buflomédil et dysfonction sinusale :
Une patiente de 93 ans, aux antécédents d’HTA,d’infarctus du myocarde, d’insuffisance cardiaqueet d’insuffisance rénale chronique est hospitaliséele 21/01/2002 pour ischémie aiguë du membreinférieur droit. La patiente reçoit en traitementinitial du buflomédil (FONZYLANE®) en IV àraison de 400mg x 2/jour, de l’héparine à dosehypocoagulante et un traitement antalgique par uneassociation paracétamol/dextropropoxyphène(DIANTALVIC®), son traitement habituel étantpar ailleurs poursuivi, notamment le bisoprolol(CARDENTIEL®) à raison de 2,5mg x 2 fois parjour. Le 23/01/2002, la patiente présente unebradycardie sévère à 30 bpm sur dysfonctionsinusale, responsable d’une lipothymie. Untraitement par isoprénaline (ISUPREL®) estdébuté, qui sera poursuivi jusqu’au 26/01/2002, laposologie du buflomédil étant progressivementdiminuée jusqu’à 150 mg/jour. Aucune récidive debradycardie ne surviendra à l’arrêt del’isoprénaline.
Nos Commentaires :
Une enquête de pharmacovigilance, réalisée par leCRPV de Lille en 1997, sur les effets cardiaques dubuflomédil, a conclu que ce médicament possédait,notamment à concentration élevée, des effets deblocage des canaux calciques etvraisemblablement sodiques, laissant supposer sacontribution directe dans la genèse des troubles durythme et/ou de conduction cardiaque et des arrêtscirculatoires constatés lors des surdosages enbuflomédil. L’existence d’une insuffisance rénale,le traitement antérieur par bisoprolol etl’utilisation de fortes doses, associés auxpropriétés cardiaques du buflomédil, peuventvraisemblablement expliquer par addition deseffets, la bradycardie sévère observée chez cettepatiente après seulement 2 jours de traitement parbuflomédil. La régression complète des symptômeset l’absence de récidive après adaptation des dosesde buflomédil à l’état de la fonction rénale,plaident également en faveur de cette hypothèse.Cette observation permet de rappeler la gravité dessurdosages en buflomédil, susceptibles des’exprimer très précocement par un tableauneurologique (convulsions) et cardiovasculairepouvant évoluer vers un coma et un arrêt cardio-circulatoire.
Dispositifs transdermiques contenant de lanicotine et allergie cutanée:
Un patient présente 24 heures après la pose d’unpatch de NIQUITIN®, une induration et unérythème cutané au site d’application. Cessymptômes régresseront totalement, en plusieursjours, après le retrait du patch. Le patient avaitantérieurement utilisé un autre dispositiftransdermique contenant de la nicotine, sanssurvenue de réaction cutanée.
Nos Commentaires :
L’intérêt et l’efficacité des patchs contenant de lanicotine ont été bien démontrés dans le sevragetabagique. Les effets indésirables cutanés de cesproduits peuvent être divisés en nonimmunologiques et immunologiques (ouallergiques). Les premières correspondent le plussouvent à une dermite irritative, d’apparitionprécoce après la pose du patch et qui restelocalisée au site d’application. Celle-ci est le plussouvent liée à la macération induite par le patchmais peut également être induite par la nicotine,les composants du patch (gel où la nicotine eststockée, par exemple) ou la combinaison des deux.Bien qu’aucun examen complémentaire n’ait étéréalisé, l’observation précédemment citée entredans ce cadre. Les secondes, correspondent à desréactions d’hypersensibilité de type IV (retardée àmédiation cellulaire) et, de façon étonnante, lanicotine semble en être l’agent le plus fréquemmentresponsable, alors que l’allergie au tabac estexceptionnelle au regard du nombre de fumeurs etque, parmi les quelques rares cas d’authentiqueallergie au tabac, aucun n’était imputable à lanicotine.
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