AddictoVigilance InfoS n°2
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A.V.IS. n°2 – août 2011
Ont participé à la
rédaction de ce numéro :
Pr. R. BORDET
Dr. S. DEHEUL
Dr. A.-S. CAOUS
SOMMAIRE
Le syndrome de sevrage lié aux génériques du SUBUTEX® : mythe ou réalité ?
Connaissez-vous les « poppers » ?
La fiche de déclaration
La 4 fluoroamphétamine (4-FA) classée comme stupéfiant
Quelques définitions en addictologie
Votre question, notre réponse
Le syndrome de sevrage lié aux génériques du SUBUTEX® : mythe ou réalité ?
Depuis l’arrivée sur le marché des premiers génériques du
SUBUTEX® (buprénorphine Arrow en 2006 puis Mylan en 2007), plusieurs
cas de syndrome de sevrage apparaissant lors du passage du princeps au
générique, ont été notifiés aux C.E.I.P.-Addictovigilance et aux Centres
Régionaux de Pharmacovigilance (C.R.P.V.). Les principaux signes décrits
sont douleurs, nervosité, anxiété, troubles du sommeil et sueurs. Pour certains
de ces patients, la dose de buprénorphine administrée a dû être augmentée.
Actuellement, le nombre de cas notifiés est en baisse, alors que le taux de
substitution reste stable. Cela peut signifier que l’acceptation des génériques
par les patients s’est améliorée avec le temps ou bien que les professionnels
de santé notifient moins ces cas de sevrage.
Les génériques ont la même composition qualitative et quantitative en
principe actif, la même forme pharmaceutique et la même biodisponibilité
que le princeps. Cependant, un écart dans ces paramètres jugé cliniquement
non significatif est toléré. Néanmoins, la pharmacodépendance est un
contexte particulier et il est possible que ces patients soient capables de
ressentir des écarts minimes de concentration en principe actif.
On ne peut pas exclure non plus que ce syndrome de sevrage soit lié à
un effet nocebo : certains patients, très attachés à la forme ou à la galénique
du comprimé, à la boîte…peuvent craindre un manque d’efficacité d’un
générique qui se dissout plus rapidement, n’a pas la même forme ou la même
présentation que leur traitement habituel.
Enfin, lors de leur mise sur le marché, les génériques étaient présentés
comme rendant les mésusages (injection, revente…) plus difficiles. Il est
possible que certains patients refusent la substitution pour cette raison.
Au total, nous ne disposons pas actuellement d’arguments solides en
faveur d’une différence significative entre la biodisponibilité du princeps et
celle du générique. L’utilisation des génériques est possible. Si l’on souhaite
prescrire un générique ou substituer par un générique, il semble judicieux de
le faire dès la mise en place du traitement et de ne pas changer de générique
en cours de traitement.
Sources :
« Un exemple de complémentarité entre l’évaluation des C.R.P.V. et celle
des C.E.I.P. » C. Victorri-Vigneau, M. Gérardin-Marais, M. Mallaret, P.
Jolliet, Thérapie 2006 63 (6) :468-471
Commission Nationale des Stupéfiants et Psychotropes du 17/02/2011 ;
www.afssaps.fr
A.V.IS. (Bulletin du CEIP-Addictovigilance) n°2 – Août 2011
A.V.IS. n°2 – août 2011 2
Le dossier de l’AVIS
Connaiissez-vous lles « poppers » ?
· Qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit de préparations liquides jaunâtres, volatiles, d’odeur caractéristique, contenant des nitrites
d’alkyles, en solution dans de l’éthanol, des huiles essentielles et d’autres solvants. Ces solutions sont
présentées sous forme d’ampoules ou de petits flacons en verre coloré et sont destinées à être inhalées.
Les nitrites les plus fréquemment utilisés sont les nitrites de butyle, de propyle, de pentyle (alias
amyle) et de cyclohexyle et leurs isomères.
Ils sont connus sous différents noms : « Jungle juice », « Quicksilver », « Pearls », « TNT », « Sex
line »…D’abord vendus dans les sex-shops, les « poppers » sont parfois disponibles dans des discothèques,
dans la rue ou sur Internet.
Le statut juridique des nitrites, d’abord assez flou puisque certains d’entre eux étaient autorisés à la
vente et d’autres interdits, vient d’être clarifié par un tout récent arrêté (29/06/2011) qui interdit « l’offre et la
cession » de tous les nitrites d’alkyles (1).
· Quels sont les effets recherchés par les utilisateurs?
Les nitrites contenus dans les « poppers » sont des donneurs de monoxyde d’azote (NO), un puissant
relaxant des muscles lisses. Ils provoquent dans les 30 à 60 secondes après l’inhalation, une sensation
d’euphorie, de désinhibition puis d’ébriété, résultat d’une vasodilatation intense et généralisée qui entraîne
une hypotension artérielle et des palpitations cardiaques. Ces effets ne durent pas plus de 5 minutes.
D’autre part, les effets du NO sur les fibres musculaires lisses à type de relaxation du sphincter anal
sont des effets recherchés par la communauté homosexuelle masculine. C’est d’ailleurs dans la communauté
homosexuelle masculine que l’utilisation des « poppers » a été mise en évidence dans les années 1970. Elle
s’est ensuite étendue à d’autres usagers en milieu festif. En France, on note une nette augmentation de la
fréquence d’expérimentation (au moins un usage au cours de la vie) chez les jeunes de 17 ans (de 2,4% en
2000 à 13,7% en 2008) et en particulier chez les filles (de 1,3% en 2000 à 13,2% en 2008) (2). Leur obtention
aisée, leur prix modéré, leur facilité d’utilisation (inhalation sans préparation) et de partage pourraient
expliquer cet important accroissement d’utilisation.
· Quels sont les risques ?
Les « poppers », présentés comme « peu toxiques », ont néanmoins de nombreux effets négatifs,
circulatoires, cardiaques, respiratoires ou visuels qui peuvent être graves.
L’intoxication peut, en effet, provoquer des nausées voire des vomissements. La vasodilatation intense
engendrée par les « poppers » peut entraîner, entre autres, céphalées, chutes, pertes de connaissance, voire,
dans les cas graves, un collapsus cardio-vasculaire. A ces effets, peuvent s’ajouter ceux causés par une
possible méthémoglobinémie (cyanose, hypoxie tissulaire,…).
Des effets respiratoires de type toux, bronchospasme, pneumopathie d’inhalation voire détresse
respiratoire peuvent survenir chez certains usagers.
Les nitrites se dégradent au contact des muqueuses en acide nitreux, qui peut induire des irritations
nasales, périorales et trachéo-bronchiques (3). Des dermites de contact caractéristiques, se traduisant par des
lésions du nez et du visage recouvertes de croûtes jaunâtres, ont également été décrites(4).
Des troubles oculaires rares et inhabituels (baisse d’acuité visuelle, vision colorée avec perception
de points lumineux, photophobie) peuvent survenir, après une consommation par inhalation (sans projection
oculaire), ponctuelle ou chronique. Leur délai d’apparition varie de quelques secondes à 3 jours. Une
amélioration des symptômes est notée dans moins de la moitié des cas (guérison en quelques semaines après
l’arrêt des « poppers »).La fréquence de ces troubles est probablement sous-estimée car, d’une part, les
patients ne déclarent pas toujours avoir utilisé des « poppers » et, d’autre part, les anomalies rétiniennes sont
discrètes et peuvent être méconnues et donc non recherchées par un praticien non averti (5).
Suite page 3
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La fiche de déclaration
Nous vous rappelons que tout cas d’abus ou de pharmacodépendance grave (même
connu) ou inattendu, lié à un médicament, à une plante ou à toute autre substance (hormis le
tabac et l’alcool), doit être déclaré obligatoirement au CEIP-A. (article 5132-114 du code de la
santé publique). Vous pouvez déclarer sur papier libre ou sur le formulaire disponible sur le site :
www.afssaps.fr (accès stupéfiants et psychotropes/ rubrique : formulaires et
démarches/signalement de pharmacodépendance)
L’abus est l’utilisation excessive et volontaire, permanente ou intermittente, d’une ou
plusieurs substances psychoactives, ayant des conséquences préjudiciables à la santé physique ou
psychique.
La pharmacodépendance est l’ensemble des phénomènes comportementaux, cognitifs et
physiologiques d’intensité variable, dans lesquels l’utilisation d’une ou plusieurs substances
psychoactives devient hautement prioritaire et dont les caractéristiques essentielles sont le désir
obsessionnel de se procurer et de prendre la ou les substances en cause et leur recherche
permanente ; l’état de dépendance peut aboutir à l’auto-administration de ces substances à des
doses produisant des modifications physiques ou comportementales qui constituent des
problèmes de santé publique (article R. 5132-97 du code de la santé publique) (1). La réduction
voire l’abandon d’importantes activités sociales peut également caractériser cet état de
pharmacodépendance.
(1)Source : www.legifrance.gouv.fr
Un effet cancérogène est rapporté pour le nitrite d’isobutyle. L’existence d’un tel effet avec les
autres nitrites doit être recherchée.
Il convient de rappeler également que le risque d’utilisation de ces produits à des fins délictueuses
ou criminelles (soumission chimique) ne peut être exclu.
Enfin, le potentiel d’abus et/ou de dépendance des « poppers » est actuellement mal connu.
· Que dit la législation ?
Sur avis de la Commission Nationale des Stupéfiants et Psychotropes du 21/04/2011, un récent
arrêté du Ministre de la Santé, paru au Journal Officiel du 07 juillet 2011, applique à tous les nitrites
d’alkyles, une partie de la réglementation des stupéfiants. « L’offre et la cession au public des produits, à
l’exception des médicaments, contenant des nitrites d’alkyles aliphatiques, cycliques ou hétérocycliques et
leurs isomères sont interdites » (6).
Les connaissances sur les effets des « poppers » sont actuellement limitées et nécessitent des
études complémentaires, qui passent, en particulier, par les notifications spontanées des professionnels de
santé.
Si vous avez connaissance d’effets délétères liés à la consommation de « poppers », n’hésitez
pas à en faire part à votre C.E.I.P.-Addoctivigilance.
(1) Journal Officiel du 07/07/2011
(2) « Note relative à l’usage des « poppers » » Observatoire Français des drogues et des toxicomanies (www.ofdt.fr)
(3) Base de données Orythie du C.E.I.P.-A. de Grenoble (www.centres-pharmacodependance.net)
(4) OFDT
(5) Commission Nationale des Stupéfiants et des Psychotropes du 24/06/2010
(6) Arrêté du 29/06/2011 paru au Journal Officiel du 07/07/2011
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Actualités législatives
La 4-fluoroamphétamine (4-FA) classée comme stupéfiant
La 4-FA est une drogue de synthèse, apparue en 2003 et appartenant à la famille des
amphétamines. Elle a fait l’objet d’une enquête d’addictovigilance menée par le C.E.I.P.-A. de Lille.
Les résultats de cette enquête ont été présentés à la Commission Nationale des Stupéfiants et
Psychotropes (C.N.S.P.) le 17/12/2010 (1).
La 4-FA se présente sous forme de comprimés, de poudre ou de liquide, portant des appellations
variées (« 4-FMP », « Flux », « Xénon », « Bongbastic » ou encore « R2D2 »). Elle est consommée par
voie orale, nasale (« sniff »), sublinguale, intraveineuse ou rectale, dans des contextes festifs et/ou
récréatifs. Elle est vendue sur des sites Internet ou proposée au cours de soirées. Elle est souvent présentée
comme étant de l’amphétamine ou de l’ecstasy.
La 4-FA procure des effets « positifs » tels qu’une relaxation, un apaisement ainsi qu’une
stimulation physique, psychique et sexuelle, avec euphorie, désinhibition et effets entactogènes(2). Ses
effets négatifs sont variés : distorsions visuelles, anorexie, insomnie pouvant durer de quelques heures à
quelques jours, sueurs, vertiges, nausées ou encore brûlures nasales ou buccales en cas de sniff ou de
prise sublinguale. La « descente »(2) peut se traduire par des sensations de fatigue, des douleurs
musculaires ou des signes dépressifs voire une attaque de panique. La 4-FA a un potentiel d’abus de type
amphétaminique. Elle a été impliquée, avec d’autres substances, dans 2 décès en Grande-Bretagne.
A l’issue de cette présentation, la C.N.S.P. a émis un avis favorable à l’inscription de la 4-FA sur
la liste des stupéfiants. Cet avis a permis à l’AFSSAPS de proposer ce classement au Ministre du Travail,
de l’Emploi et de la Santé. L’arrêté de classement a été publié au Journal Officiel du 16 mars 2011(3).
(1) Compte-rendu disponible sur www.afssaps.fr, onglet Stupéfiants et Psychotropes
(2) Voir encadré « Quelques définitions en addictologie »
(3) www.afssaps.fr-infos de sécurité-communiqués et points de presse
Quelques définitions en addictologie
Qu’est-ce qu’une substance entactogène ?
Il s’agit d’une substance qui favorise les contacts, la communication voire l’empathie.
Exemples : la cocaïne, le cannabis, les amphétamines et l’ecstasy.
Le high et la descente
Le high est l’état de bien-être intense, d’exaltation ressenti lors de la prise d’un produit. Il précède
souvent le feeling qui est un état plus ou moins hallucinatoire.
La descente ou down est l’état de somnolence ou de dépression qui survient lorsque l’effet de la
substance psychotrope disparaît.
Le bad trip ou mauvais voyage
Il s’agit d’une « réaction anxieuse aiguë, parfois associée à des hallucinations très désagréables,
qui suit la prise d’une substance psychoactive ».
Source : www.centres-pharmacodependance.net, glossaire dans la base de connaissances Orithye du CEIP de
Grenoble.
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