Brèves en pharmacovigilance n°12
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Brèves en Pharmacovigilance
SOMMAIRE
Editorial
THS de la ménopause : le sort
s’acharne !
Littérature
Les AINS en début de grossesse augmentent-ils le risque d’avortement spontané ?
Association dextropropoxyphène et paracétamol : une prescription à ne pas banaliser
A suivre…
Bupropion et risque d’angor, de dépression et suicides
Hydroxyurée et ulcères de jambes
Questions
Pourquoi un lupus erythematuex contre-indique l’utilisation d’ibuprofène ?
Que faire chez un patient aux ATCD d’hépatite et présentant une élévation des transaminases sous statine ?
Observations
Méthadone et myoclonies
Toxidermie à l’etifoxine
Ont participé à la réalisation de
ce numéro :
N. Ait Said
J. Caron
E. Couderc
J. Dekemp
L. Ferez
S. Gautier
J. Pamart
Brev Pharmacovig 2003 mai-août; 12 1
. Brèves en
Pharmacovigilance
Numéro 12, mai-août 2003
Editorial : Traitement hormonal substitutif de la ménopause : le
sort s’acharne !
Lors de nos brèves n°7, nous avions évoqué l’étude WHI1 qui avait
montré qu’un traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause par
une association d’oestrogènes d’origine équine et d’acétate de
médroxygestérone augmente le risque de cancer du sein, le risque
thromboembolique, le risque d’accident cardiovasculaire et le risque
d’accident vasculaire cérébral. A partir de cette même étude, il ressort, après
une nouvelle analyse des résultats, qu’il existe également une augmentation
du risque de démence chez la femme traitée avec 23 cas supplémentaires
pour 10000 femmes, pendant 1 an2. Ces résultats viennent là encore à
l’encontre des nombreuses études déjà réalisées sur le sujet.
Par ailleurs, le risque de cancer du sein lors d’un THS de la
ménopause a été confirmé par une étude prospective réalisée au Royaume
Uni entre 1996 et 2001 auprès de plus d’un million de femmes
ménopausées3. L’information est importante, puisqu’à la différence de
l’étude WHI où les femmes étaient traitées par une association d’oestrogènes
équins sulfoconjugués et d’acétate de médroxyprogestérone très peu utilisée
en France, les traitement utilisés dans cette nouvelle étude sont prescrits en
France.
Ces nouvelles données complètent les connaissances sur le risque lié
à l’utilisation du THS de la ménopause et vont conduire l’Agence
européenne du médicament à une nouvelle évaluation de son rapport
bénéfice/risque4.
1-JAMA2002;289:2651-72; 2-Communiqué Afssaps 26 mai 2003; 3-Lancet
2003;362:419-27; 4-Communiqué Afssaps 8 août 2003
Le CRPV Nord – Pas de Calais, situé au niveau du CHRU de Lille, recherche
un MEDECIN vacataire. Le travail, formateur au bon usage du Médicament,
consiste en l’évaluation des effets indésirables des médicaments et la réponse
aux questions des praticiens de la région Nord – Pas de Calais.
Contact : J. Caron
– tél. 03.20.96.18.18 ou 03.20.44.54.49
– fax 03.20.44.56.87
– Email crpv@chru-lille.fr ou j-caron@chru-lille.fr
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ou envoyez-nous un e-mail (crpv@chru-lille.fr).
Brev Pharmacovig 2003 mai-août; 12 2
Brèves de la Littérature
Les AINS en début de grossesse
augmentent-ils le risque d’avortement
spontané ?
La question avait déjà été posée en 2001 par une
équipe danoise. Elle est à nouveau soulevée par les
résultats d’une étude américaine. Pendant 2 ans (de
1996 à 1998), les auteurs ont inclus dans une
cohorte, au moment de leur déclaration de
grossesse, toutes les femmes enceintes d’un
système de santé privé californien (Kaiser
Permanente Medical Care Program). A la suite de
cette déclaration, 1055 femmes ont accepté de
répondre au questionnaire de l’étude, portant sur les
traitements par anti-inflammatoires non stéroïdiens
(AINS), par aspirine et par paracétamol reçus
depuis leurs dernières règles jusqu’au moment de
l’interview. L’évolution des grossesses dans les 20
premières semaines de grossesse a été
systématiquement renseignée. Après avoir ajusté
sur certains facteurs confondants (antécédents
d’avortements spontanés, niveau socio-éducatif, âge
maternel, parité, race, utilisation d’un jacuzzi, prise
de compléments vitaminés, tabagisme), il apparaît
que l’utilisation d’AINS en début de grossesse
expose à un risque relatif d’avortement spontané de
1,8 (IC95 : 1,0 –3,2). Ce risque serait plus
important lorsque l’AINS est utilisé au moment de
la conception (RR = 5,6 ; IC95 : 2,3-13,7) ou
pendant plus d’une semaine (RR = 8,1; IC95 : 2,8-
23,4). Le risque est également retrouvé pour
l’aspirine, bien que l’association soit moins forte
qu’avec les AINS, peut-être en raison d’un faible
nombre d’utilisatrices. Par contre, aucune
association significative n’est retrouvée avec le
paracétamol. Si les auteurs insistent sur la nécessité
de confirmer ces données, en raison des quelques
limites de l’étude discutées dans l’article, le
problème posé, et ce à deux reprises désormais,
mérite l’attention. En l’état, le paracétamol reste
bien sûr l’antalgique de choix de la grossesse.
BMJ 2003;327:368-71
Association dextropropoxyphène et
paracétamol : une prescription à ne pas
banaliser
Commercialisé sous les noms de DIANTALVIC®,
ALGOCED®, DIALGIREX®, DIADUPSAN®,
DIOALGO®, DI-DOLKO®, STAREM®,
PROPOFAN®, cette association est indiquée dans
le traitement symptomatique des douleurs
d’intensité modérée à intense (pallier II de l’OMS).
Une étude réalisée en Grande-Bretagne confirme
les risques liés à l’utilisation de cette association
dans le cas d’un surdosage. L’ensemble des suicides
en Angleterre et en Ecosse entre 1997 et 1998 a été
analysé, afin de déterminer les incidences de décès
attribués à l’association dextropropoxyphène
/paracétamol seule, aux antidépresseurs tricycliques
seuls ou au paracétamol seul. Sur 15299 décès par
suicide, 4162 sont d’origine médicamenteuse, dont
18 % relatifs à la seule prise de
dextropropoxyphène/paracétamol, 22% à la seule
prise d’antidépresseurs tricycliques, et 9% à la seule
prise de paracétamol. Le risque de décès avec
l’association dextropropoxyphène/paracétamol est
2,3 fois plus important (IC95 : 2,1-2,5) que sous
antidépresseurs tricycliques, et 28,1 fois plus
important (IC95 : 24,9-32,9) que sous paracétamol.
Les auteurs estiment qu’en l’absence de preuve
d’une supériorité de l’association
dextropropoxyphène/paracétamol par rapport au
paracétamol dans la prise en charge de la douleur à
court terme, la prescription de cet antalgique se doit
d’être mesurée.
BMJ 2003;326:1006-8
A suivre…
·· Les résultats de l’enquête menée par le centre de
pharmacovigilance de Saint Etienne sur les effets
indésirables notifiés au cours de la première année de
commercialisation du bupropion (ZYBAN) en
France, ont été présentés aux 24èmes Journées
Françaises de Pharmacovigilance. A côté des
classiques effets indésirables neurologiques
(principalement convulsions) et d’hypersensibilité
(urticaires, angioedèmes), apparaissent quelques
rares cas d’angor ou d’infarctus du myocarde chez
des patients porteurs le plus souvent de lésions
coronaires pré-existantes, et de dépression, de
tentative de suicide et de suicides. Bien que
l’interprétation de ces dossiers soit délicate dans un
contexte de sevrage tabagique et de facteurs de risque
cardiovasculaire, ces données méritent d’être
gardées en mémoire
·· L’hydroxycarbamide ou hydroxyurée (HYDREA)
est un agent alkylant, indiqué dans la prise en charge
de plusieurs hémopathies, notamment de la maladie
de Vaquez. Son utilisation prolongée peut entraîner
des ulcères de jambes, heureusement rares (< 0.1%
des traitements), qui apparaissent en moyenne après 2
à 4 ans de traitement. Ces ulcères, dont le mécanisme
est inconnu, ont une localisation distale (talon,
malléole, tendon d'Achille), parfois bilatérale. Ils
deviennent extrêmement douloureux avec le temps et
leur prise en charge est délicate et souvent longue,
soulignant l'intérêt d'un diagnostic précoce.
…
Brev Pharmacovig 2003 mai-août; 12 3
Vos questions au CRPV
Pourquoi un lupus érythémateux disséminé contre-indique l'utilisation de l'ibuprofène ?
Dans le résumé des caractéristiques (RCP) des différentes spécialités d'ibuprofène oral, on peut lire que
le lupus érythémateux disséminé (LED) est une contre-indication à l'utilisation de l'ibuprofène ; il est
par ailleurs signalé que la survenue d'une méningite aseptique en présence d'ibuprofène doit faire
rechercher un LED ou une connectivite.
La méningite aseptique est une complication rare mais classique des anti-inflammatoires non
stéroïdiens (AINS). Plusieurs AINS ont été impliqués, mais la plupart des observations publiées
concernent des patients traités par ibuprofène. Une association fréquente avec le LED a par ailleurs été
précocement mise en évidence. Ainsi, dans une revue de la littérature de 2000, sur 39 observations de
méningites aseptiques publiées sous ibuprofène, 18 survenaient chez des patients atteints de LED. Les
manifestations cliniques de cet effet indésirable sont typiquement celles d'un syndrome méningé franc,
survenant le plus souvent précocement après la prise du traitement, notamment lors d'une
réintroduction de l'AINS. L'évolution est favorable dans tous les cas. Le mécanisme de survenue de
cette méningite n'est pas connu mais l'hypothèse d'un mécanisme immunologique est habituellement
évoquée.
Ces données expliquent qu'entre 1993 et 2000, l'information sur le risque de méningite aseptique en
présence d'ibuprofène, et la contre-indication de son utilisation en cas de LED, soient progressivement
apparues dans le RCP des différentes spécialités d'ibuprofène.
Pour les autres AINS, si la possibilité de méningite aseptique est présente dans le dictionnaire Vidal
pour le diclofénac et le naproxène, la contre-indication en cas de LED n'est par contre pas retenue.
Drug Safety 2000;22:215-226
Que faire chez un patient aux antécédents d'hépatite médicamenteuse et présentant une élévation
asymptomatique des transaminases à 1,5 fois la normale après deux mois de traitement par
statine?
Deux tableaux doivent être définis lorsqu'on évoque la toxicité hépatique des statines :
1) d'un coté, les hépatopathies aiguës, qui sont exceptionnellement retrouvées avec les statines et
surviennent le plus souvent dans les trois mois suivant la mise en route du traitement. Elles peuvent être
de tout type (cytolytique, cholestatique ou mixte) et sont de gravité variable. L'origine de ces réactions
est idiosyncrasique. Il est à noter que ces atteintes hépatiques peuvent apparaître avec les statines mais
aussi avec les fibrates. Seule la cholestyramine (QUESTRAN) ne semble pas concernée. La survenue
d'un tel tableau justifie l'arrêt définitif de la statine. L'utilisation d'une autre statine a, dans des cas
encore plus exceptionnels, était réalisée sans survenue d'une nouvelle atteinte hépatique.
2) de l'autre, l'élévation modérée des transaminases, fréquemment associée au début du
traitement (1 à 3 % des patients). Cette élévation, très souvent transitoire, dépendante de la dose, reste
inférieure à 3 fois la normale, sans symptomatologie clinique, et régresse la plupart du temps sans l'arrêt
de la statine. Là encore, ces atteintes hépatiques sont communes aux hypolipémiants.
Dans le cas particulier de ce patient, une surveillance rapprochée du bilan hépatique est bien
évidemment nécessaire. La normalisation du bilan hépatique a toute chance d'être spontanément
observée. La persistance d'une élévation des transaminases et une augmentation au delà de 3N
justifierait l'arrêt de la statine.
Brev Pharmacovig 2003 mai-août; 12 4
Observations
Méthadone et myoclonies
Un enfant de 7 mois est hospitalisé aux urgences
pédiatriques. Il présente un état de mal
myoclonique associé à un myosis, une somnolence,
une hypertonie musculaire, et une dépression
respiratoire. L'analyse toxicologique montrera une
intoxication à la méthadone. Un état de mal
myoclonique peut-il être rencontré en cas
d'intoxication à la méthadone ?
Nos commentaires:
En dehors des signes classiques de
surdosage en opiacés retrouvés chez cet enfant, les
myoclonies constatées posent le problème d'un
mécanisme anoxique ou d'une responsabilité
médicamenteuse. Les myoclonies représentent un
effet indésirable bien décrit avec les opioïdes, le
plus souvent dans des circonstances de surdosage
ou de traitement prolongé. Ces myoclonies peuvent
être observées aussi bien pendant le traitement
qu'au décours d'un syndrome de sevrage,
permettant de distinguer les myoclonies induites
par le traitement et celles induites par le sevrage.
L'incidence des myoclonies varierait selon les
études de 2,7% jusqu'à 87 % !1 et leur mécanisme
reste mal élucidé. En tant qu'agoniste opioïde pur,
la méthadone est susceptible d'engendrer des
myoclonies, comme en témoignent quelques
publications de la littérature.2 Il est à noter, bien
que ceci ne semble pas le cas dans cette
observation, que la littérature médicale cite
quelques cas d'intoxications par la méthadone chez
des enfants de parents ayant l'habitude de mesurer
leur dose de méthadone dans les biberons de
l'enfant.3
1 J Pain Symptom Manage 2002;23:66-72
2 Am J Hospice Pall Care2001;13:1-3
3 BMJ 1999;318:329
années en raison d'une constipation. L'ionogramme,
la fonction rénale et le bilan hépatique sont dans les
limites de la normale. Les lésions cutanées
permettent de retrouver des éléments en cocardes,
quelques pustules et des érosions buccales. Le
traitement est immédiatement arrêté. Après une
aggravation initiale de la symptomatologie, avec
apparition de lésions bulleuses dans les premières
24 heures, une amélioration est observée en 5 jours.
La biopsie cutanée montrera un décollement dermoépidermique
et le diagnostic de syndrome de
Stevens Johnson sera retenu.
Nos commentaires :
Dans le dictionnaire Vidal, les effets indésirables
cutanés décrits avec l'étifoxine, sont rare et banals,
à type d'éruptions cutanées, et de réactions
allergiques (urticaire, oedème de Quincke). Une
enquête de pharmacovigilance sur le STRESAM,
réalisé par le CRPV de Caen en octobre 1999,
rapportait à cette époque 45 cas d'effets
indésirables cutanés dans la base nationale de
pharmacovigilance, dont 14 avaient nécessité une
hospitalisation. Ces atteintes étaient généralement
survenues entre le 1er et le 15ème jour de traitement.
Aucune toxidermie grave à type de Stevens
Johnson, ou a fortiori de syndrome de Lyell, n'a été
retrouvée, et seuls deux cas d'érythème polymorphe
étaient présents. La consultation de la base de
données des CRPV ne rapporte pas de nouveaux
cas depuis 1999.
Au total, bien qu'aucune des observations
retrouvées ne semble correspondre à ce qui a été
observé chez cette patiente, la chronologie
d'apparition des symptômes et l'amélioration
constatée à la suite de l'arrêt du traitement sont en
faveur d'une responsabilité du STRESAM dans la
survenue de ce syndrome de Stevens Johnson.
Toxidermie à l'étifoxine (STRESAM) :
Une patiente de 33 ans, aux antécédents de
toxidermies en présence de pénicilline et de
cotrimoxazole (BACTRIM) est hospitalisée pour
une éruption cutanée polymorphe, occupant plus
de 60 % de la surface corporelle, associée à un
syndrome inflammatoire avec hyperleucocytose.
Cette éruption s'est déclarée 15 jours après le
début d'un traitement anxiolytique par étifoxine
(STRESAM), alors que du macrogol 4000
(FORLAX) est utilisé depuis de nombreuses
Si vous observez un effet indésirable grave
et/ou inattendu ou
si vous désirez un renseignement sur un
médicament :
N’hésitez pas à nous contacter :
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