Brèves en pharmacovigilance n°4
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Brèves en Pharmacovigilance
Numéro 4, janvier-février 2002
SOMMAIRE
Editorial
IEC et « sartans » : même risque pendant la grossesse
Littérature
Cyprotérone et risque thromboembolique veineux
Complications disgestives hautes de l’aspirine : une méta-analyse
A suivre…
Retrait de la cérivastatine
Anticholinergiques et abus
Questions
Que faire chez une patiente enceinte de six semaines traitée par fluoxétine ?
Angio-oedème et inhibiteurs de l’enzyme de conversion : existe-t-il une allergie croisée avec les antagonistes de l’angiotensine II ?
Observations
Minocycline et hypertension intracrânienne bénigne
BCG Thérapie et syndrome de Reiter
Ont participé à la réalisation de ce numéro :
C. Bensoussan
J. Caron
E. Couderc
J. Dekemp
S. Gautier
T. Hennebelle
G. Monakm
S. Mutel
T. Ouk
J. Pamart
Editorial
Inhibiteurs de l’enzyme de conversion et « sartans » : mêmerisque pendant la grossesse !
On supposait que, par analogie avec les inhibiteurs de l’enzyme de conversion(IEC), les « sartans » étaient susceptibles d’entraîner le même risquefoetotoxique en cas de prescription pendant le deuxième et troisième trimestrede grossesse. Deux publications récentes le confirment :
– la première relate l’exposition d’un foetus à 50 mg/j de losartan entre la 20èmeet la 31ème semaine de grossesse, en raison d’une hypertension artérielle, chezune femme de 31 ans par ailleurs atteinte de périartérite noueuse (1). A 20semaines de gestation, la taille du foetus est normale ainsi que le volume duliquide amniotique. A la 31èmesemaine, l’échographie montre unoligohydramnios. Malgré l’arrêt immédiat du traitement, le foetus meurt 2jours plus tard. Des déformations des extrémités et de la face et unehypoplasie pulmonaire et des os du crâne sont retrouvées à l’autopsie.
– la deuxième publication décrit la découverte (tardive !), à la 24èmesemainede gestation, d’une grossesse chez une femme de 40 ans, traitée pour unehypertension artérielle par valsartan et aténolol (2). Le valsartan estimmédiatement arrêté, alors que le foetus est normal et le liquide amniotiquefortement diminué. Deux semaines plus tard, le volume du liquide amniotiqueest redevenu normal, mais le foetus décède à la 33ème semaine de gestationavec, à l’autopsie, une hypoplasie des poumons.
Ces publications justifient la contre-indication absolue des sartans etdes IEC pendant les 2ème et 3èmetrimestres de la grossesse, motivée par untableau foetotoxique commun : anurie foetale d’origine hémodynamique,responsable d’un oligohydramnios ayant comme conséquence foetaledesdéformations osseuses et une hypoplasie pulmonaire.
(1) Lancet 2001 ;357 :363
(2) Ann Pharmacother 2001 ;35 :859-61
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Brèves de la Littérature
Cyprotérone et risque thrombo-embolique veineux
Une étude cas-témoin, menée auprès de femmes utilisatrices d’un contraceptif oral contenant comme progestatif de l’acétate de cyprotérone (n = 24401) ou du lévonorgestrel (n = 75000) a mis en évidence une incidence plus élevée d’accidents thromboemboliques veineux en présence de cyprotérone. Parmi la population étudiée, 26 cas de thromboses veineuses idiopathiques ont été identifiés, parmi lesquels 12 cas apparus lors de l’utilisation de cyprotérone ( dont 5 embolies pulmonaires). Au total, les femmes sous cyprotérone auraient un risque 4 fois plus important de présenter un accident thromboembolique veineux, et ce, quelle que soit la durée d’exposition au produit.
Rappelons qu’en France, aucune des trois spécialités contenant de la cyprotérone n’a d’indication en contraception orale, en particulier DIANE 35®, qui officiellement, n’est indiqué que dans le traitement de l’acné chez la femme.
Lancet 2001 ;358 :1427-9
Complications digestives hautes de l’aspirine : une méta-analyse
Cette méta-analyse des études épidémiologiques publiées entre 1990 et 2001 (cohortes, cas-témoins, cas-témoins intracohortes) s’est plus particulièrement intéressée à l’évaluation des complications digestives hautes et graves de l’aspirine chez l’adulte, notamment en fonction de la dose administrée et de la forme galénique (simple, gastrorésistante et tamponnée). Après sélection, 17 études ont été retenues, dans lesquelles les complications digestives étudiées étaient représentées par les hémorragies, les perforations et les effets indésirables amenant à une hospitalisation ou à une consultation spécialisée. Les principales conclusions, par rapport à la population témoin, sont que : i) le risque relatif global des complications digestives hautes et graves associées à l’aspirine est de 2,6 (IC95% : 2,4-2,7), ii) ce risque est dose-dépendant et persiste, à peu près doublé, pour des posologies d’aspirine ≤300 mg/j, iii) ce risque est plus élevé dans le premier mois de traitement, par rapport aux mois suivants : respectivement 4,4 (IC95% : 3,2-6,1) versus 2,6 (IC95% : 2,1-3,1), iv) ce risque est plus important chez les patients régulièrement exposés à l’aspirine, par rapport à ceux exposés de façon occasionnelle, v) ce risque n’est pas diminué par les formes gastrorésistantes ou tamponnées : RR respectifs de 2,4 (IC95% : 1,9-2,9) et de 5,3 (IC 95% : 3,0-9,2) versus un RR de 2,6 (IC95% : 2,3-2,9) pour les formes simples, vi) ce risque ne dépend ni du sexe, ni de l’âge (supérieur ou inférieur à 60 ans), vii) enfin, le risque de lésions gastriques est le même que celui de lésions duodénales, et celui d’hémorragie peu différent de celui de perforation.
En conclusion, cette méta-analyse rappelle que l’utilisation de l’aspirine à des doses « dites cardioprotrectrices » (≤ 300mg/j) est à risque, et que les formes tamponnées ou gastrorésistantes ne minimisent pas le problème des complications digestives hautes et graves de l’aspirine.
Br J Clin Pharmacol 2001 ;52 :563-571
A suivre…
•Pour ceux qui veulent se faire une idée sur lesconditions du retrait de la cérivastatine(STALTOR et CHOLSTAT), en France et enEurope, un rapport très détaillé est disponible surle site de l’Agence Française de Sécurité Sanitairedes Produits de Santé : www.afssaps.sante.fr.
• Plusieurs cas d’utilisation abusive demédicaments anticholinergiques (trihexyphénidyle : ARTANE® ; bipéridène : AKINETON®…)ont été rapportés lors d’usages détournés par lestoxicomanes. Ce phénomène, lié au potentielstimulant et euphorisant de ces produits (« ecstasydu pauvre ») paraît limité mais mérite d’êtreconnu car il souligne le potentiel toxicomanogènede ces produits
Vous avez rencontré
des effets indésirables semblables,
Notifiez-les au Centre de Pharmacovigilance.
…
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Vos questions au CRPV
-drome de sevrage, soit l’existence d’uneimprégnation sérotoninergique du nouveau-né. Ledélai d’apparition et la durée de ces symptômesdépendent de la demi-vie d’élimination du produit,particulièrement longue avec la fluoxétine et sonmétabolite actif, la norfluoxétine, respectivement 4et 7 jours.
• Que conseiller dans ces conditions si letraitement est indispensable ?
1. Soit substituer à la fluoxétine unantidépresseur imipraminique : en effet, chezl’Homme, même si des cas isolés de malformationsdes membres ont été rapportés avec certainsimipraminiques, les données épidémiologiques donton dispose par ailleurs apparaissent rassurantes.Ceci est particulièrement vrai pour le chef de file decette classe thérapeutique, l’amitryptiline(LAROXYL®), pour laquelle aucun risquemalformatif n’a été démontré, malgré uneutilisation et un recul importants. Toutefois, il fautsouligner que les imipraminiques, poursuivisjusqu’au terme, peuvent occasionner chez lenouveau-né, une polypnée avec acidose et unesymptomatologie à rattacher à leur activitéanticholinergique (hyperexcitabilité, tachycardie,distension vésicale et abdominale, retard àl’émission du méconium et même, de façonexceptionnelle, crise convulsive).
2. Soit continuer le traitement parfluoxétine, notamment si la patiente est bienéquilibrée par celui-ci.
3. Quelle que soit l’option retenue, laposologie minimale efficace doit être recherchée,notamment en fin de grossesse où il est conseillé dediminuer la posologie.
Que faire chez une patiente enceinte de 6 semaines traitée par fluoxétine ?
• Deux problèmes doivent être envisagés :
1. A 6 semaines de grossesse, un risque malformatif est à évoquer. Cependant, les données concernant la fluoxétine (PROZAC®) semblent rassurantes. En effet :
– les études réalisées chez l’Animal, utilisant desdoses onze fois supérieures à celles utilisées dansl’espèce humaine, n’ont pas mis en évidenced’anomalies foetales.
– les suivis réalisés à ce jour chez plus d’un millierde femmes enceintes, exposées à la fluoxétine,pour la plupart au cours du 1er trimestre de lagrossesse, n’ont pas mis en évidenced’augmentation du risque malformatif, ni detableau malformatif caractéristique.
Deux éléments discordants viennent cependanttempérer ces données : i) une publication,controversée, a fait état d’un risque élevé demalformations mineures (15.5 % versus 6.5 % dansle groupe témoin), sans qu’aucune précision sur lanature de ces malformations n’ait été apportée ; ii)certains auteurs, sur la base d’étudesméthodologiquement discutables, ont évoquéune « tendance », non confirmée à ce jour, àl’augmentation du risque de fausses couchesspontanées.
2. Un traitement par fluoxétine, poursuivijusqu’au terme peut être responsable, chez lenouveau-né à la naissance, d’un tableau cliniqueassociant : troubles à type d’irritabilité,tremblements, hypotonie, pleurs constants,difficulté d’alimentation, troubles du sommeil. Cessymptômestraduisentsoitlasurvenued’unsyn-
un angio-oedème lors d’un traitement par IEC.
Le mécanisme physiopathologique de cet effetindésirable reste mal élucidé, bien queclassiquement le rôle de l’augmentation de labradykinine en présence d’IEC soit évoqué. Eneffet, l’enzyme de conversion de l’angiotensine(alias kininase II) intervient à la fois dans ladégradation de l’angiotensine II et de labradykinine. La rareté des angio-oedèmes enprésence d’IEC évoque cependant d’autresmécanismes physiopathologiques intervenant dansl’apparition de cet effet indésirable.
En ce qui concerne les antagonistes des récepteursAT1 à l’angiotensine II (« sartans »), des casd’angio-oedème ont été rapportés, avec unefréquence toutefois moindre qu’avec les IEC. Lalittérature rapporte ainsi une vingtaine de cas,chez des patients dont plusieurs avaient présenté
Angio-oedème et inhibiteurs de l’enzyme de conversion : existe t’il une allergie croisée avec les antagonistes de l’angiotensine II ?
L’angio-oedème se définit comme un oedème aigusous-cutané (hypodermique), dont la manifestationla plus classique est l’oedème de Quincke. Sasurvenue chez les patients traités par inhibiteurs del’enzyme de conversion (IEC) est un phénomènerare, rencontré chez environ 0,1 % des patientstraités. Les délais d’apparition sont très variables, leplus souvent de quelques heures à un mois après ledébut du traitement, mais des observations plustardives ont été rapportées (jusqu’à 8 ans après ledébut du traitement !). L’âge et le sexe semblent nepas avoir d’influence sur la fréquence de survenuede ces angio-oedèmes. Par contre, les patients derace noire auraient un risque accru de développer
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puisque, pour autant que l’on sache, les sartansn’interfèrent pas dans sa dégradation.
Ces données, malgré l’absence de rationnelphysiopathologique, ne permettent doncpasd’écarter la possibilité d’une allergie croisée entreles IEC et les sartans. Il est donc raisonnable, ànotre avis et bien que cela ne constitue pas unecontre-indication, d’éviter l’administration d’unsartan chez un patient aux antécédents d’angio-oedèmesousIEC
initialement un angio-oedème sous IEC. Dans laBanque Nationale de Données dePharmacovigilance française , 20 cas d’angio-oedèmes, survenus au cours d’un traitement parsartans sont recensés ; 6 d’entre-eux sont apparuschez des patients ayant un antécédent d’urticaire oud’oedème de Quincke sous IEC. Le mécanismephysiopathologique des angio-oedèmes en présencede sartans n’est pas connu, mais ne metvraisemblablementpasencauselabradykinine
Observations
en quelques heures ou semaines. Parfois une courte
corticothérapie peut être nécessaire. Cet effet indésirable semblerait plus fréquent avec la minocycline qu’avec les autres cyclines, peut être en raison, selon certains auteurs, d’un meilleur passage dans le SNC, lié à sa lipophilie.
Minocycline et hypertension intracranienne benigne
Un adolescent de 16 ans présente, 15 jours après la reprise d’un traitement pour de l’acné par minocyline (ZACNAN®), des céphalées, des sensations vertigineuses et un nystagmus . Les examens cardiologique, neurologique et complémentaires (EEG, scanner cérébral, fond d’oeil, angio-IRM cérébral) sont tous normaux. La ponction lombaire n’a pas été réalisée. La disparition des céphalées et la négativité du bilan entraîne une sortie d’hospitalisation rapide avec reprise du traitement par minocycline et réapparition de céphalées intermittentes. Seul l’arrêt définitif de la minocycline, permettra la régression complète des symptômes.
Bcg therapie et syndrome de Fiessinger-Leroy-Reiter :
Deux jours après une sixième cure par IMMUCYST® (lyophilisat de bactéries BCG), indiqué dans le traitement d’un cancer de la vessie, une conjonctivite bilatérale est observée chez un patient de 57 ans. Après discussion avec le notificateur, des arthralgies disséminées prédominant au niveau du genou gauche et des brûlures mictionnelles sont également décrites par le patient. La BCG thérapie est interrompue et un traitement antituberculeux instauré. L’ensemble des symptômes régressera en quelques semaines.
Nos commentaires :
Bien qu’aucun élément paraclinique de certitude ne soit présent dans cette observation, le diagnostic d’hypertension intracrânienne bénigne peut être évoqué en raison d’une probable réapparition des symptômes lors de la reprise du traitement et leur disparition complète à son arrêt. En effet, la survenue d’une hypertension intracrânienne bénigne est un effet indésirable rare, mais bien décrit lors de traitements par cyclines, notamment lorsqu’elles sont utilisées au long cours dans le traitement de l’acné. Cet effet indésirable, décrit initialement chez l’enfant puis chez l’adulte, survient dans des délais variables de quelques jours à quelques semaines (<4) après l’instauration du traitement, bien que quelques cas aient été rapportés à plus long terme (jusqu’à 18 mois après le début du traitement). Les signes cliniques évocateurs sont des céphalées, des nausées, des vomissements, des vertiges, des acouphènes et des troubles de la vision. Aucune anomalie intracrânienne particulière n’est visible sur le scanner ou l’angiographie cérébrale. La réalisation d’un fond d’oeil peut mettre en évidence un oedème papillaire, souvent bilatéral. Seule une ponction lombaire permet de mettre en évidence une élévation de la pression intracrânienne, sans qu’il y ait par ailleurs d’anomalie cytologique ou biochimique du LCR. A l’arrêt du traitement, les symptômes régressent totalement et spontanément
Nos commentaires :
Une atteinte conjonctivale est possible avec IMMUCYST® dans le cadre d’un syndrome de Fiessinger-Leroy-Reiter. Cette conjonctivite serait inaugurale de la triade caractéristique de ce syndrome : atteinte conjonctivale-atteinte urétrale-atteinte articulaire. La littérature rapporte une dizaine de cas, qui interviennent quelques semaines après l’introduction du traitement et régressent sans séquelle après arrêt du traitement. Une enquête nationale de pharmacovigilance de 1999 recense sept cas de ce syndrome entre 1994 et 1999 en France. Un terrain génétique particulier, caractérisé par la présence de l’HLA-B27, et susceptible de favoriser l’apparition de ce syndrome, est signalé dans 4 cas sur 7. L’attitude préconisée pour le traitement de ces symptômes est, après arrêt des instillations d’IMMUCYST®, l’administration d’un AINS (indométacine de préférence), associé ou non à une quinolone, afin de diminuer la concentration en BCG de la paroi vésicale. En l’absence de réponse dans les 12 à 15 jours suivants, il faut envisager une bi-thérapie antituberculeuse.
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Si vous observez un effet indésirablegrave et/ou inattendu ou
si vous désirez un renseignement sur un médicament : N’hésitez pas à nous contacter.
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