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Brèves en Pharmacovigilance
Numéro, Octobre – Décembre 2014
SOMMAIRE
Editorial

Antivitamines K : une habitude bien française de la fluindione
Vos questions
Quelles sont les recommandations concernant la vaccination des nouveaux-nés exposés in utero aux anti-TNF alpha ?
Littérature
Risque d’hémorragie du post partum (HPP) chez les femmes traitées par un antidépresseur IRS au moment de l’accouchement
Cotrimoxazole, un risque cardiaque en association aux IEC ou ARAII ?
Compte rendu de la 4ème journée de pharmacovigilance

Ont participé à la réalisation
de ce numéro :
M. Auffret
J. Béné
J. Caron
J. Dekemp
S. Gautier
J. Pamart
EDITORIAL – Antivitamines K : une habitude bien française de la fluindione
Le Centre Régional de Pharmacovigilance de Lyon présentait à l’occasion du
Comité Technique de Pharmacovigilance de Juin 2014 les résultats de son
enquête concernant l’incidence des effets indésirables non hémorragiques
graves des antivitamines K (AVK) (1). Il ressortait de cette étude un risque bien
connu, rare mais grave, d’atteintes immuno-allergiques lors de la prise de
fluindione ayant conduit, il y a déjà bien longtemps, de nombreux pays à
abandonner l’utilisation de cette molécule.
En effet, la fluindione, AVK de la famille des indane-diones, est associée à la
survenue de cas d’atteintes rénales sévères et notamment de néphropathies
tubulo-interstitielles de mécanisme immuno-allergique. A ces atteintes rénales
s’ajoute un risque d’atteintes cutanées à type de réaction médicamenteuse
avec éosinophilie et symptômes systémiques (DRESS syndrome), de pustuloses
exanthématiques aiguës généralisées, de toxidermies sévères ou encore de
vascularites. Ces effets indésirables immuno-allergiques surviennent
essentiellement dans les trois premiers mois du traitement par fluindione (bien
que des apparitions tardives soient possibles), sont certes rares mais sont
potentiellement graves. Elles peuvent être à l’origine de séquelles, en
particulier rénales, en cas de diagnostic tardif. De tels effets indésirables ont
été, par comparaison, exceptionnellement décrits avec les dérivés
coumariniques (warfarine et acénocoumarol) et aucun risque de réaction
croisée n’est par ailleurs attendu entre ces deux classes d’anticoagulants.
La warfarine (COUMADINE®) est, rappelons-le, l’AVK de référence, faisant
l’objet des grands essais cliniques internationaux. C’est également l’AVK ayant
la demi-vie d’élimination plasmatique la plus longue (35 à 45 heures)
permettant ainsi une meilleure stabilité de l’anticoagulation. Outre ces
arguments, la warfarine existe sous deux dosages (2 mg et 5 mg), sécables,
permettant ainsi une facilité d’adaptation des doses, notamment pour les sujets
dont l’INR est difficile à équilibrer, les sujets hypersensibles ou résistants aux
AVK. Dès lors, la logique et l’intérêt pour le patient devraient nous amener
depuis longtemps à privilégier l’utilisation de la warfarine à celle de la
fluindione, ce qui est régulièrement contredit par les chiffres de ventes de ces
produits (2), traduisant en France la force de l’habitude !
(1) Réunion du Comité Technique de Pharmacovigilance du 17 juin 2014. Compte rendu de
séance. http://ansm.sante.fr/L-ANSM2/Comites-techniques/Comitestechniques/
Quatre-comites-techniques/Comite-technique-de-pharmacovigilance.
(2) http://ansm.sante.fr/Dossiers/Les-anticoagulants/Les-anticoagulants-en-France-
Etudes-et-surveillance/(offset)/02013.
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Vos Questions
Quelles sont les recommandations concernant la vaccination des nouveaux-nés exposés in utero aux
anti-TNF alpha ?
La littérature comporte un « case report » (1) d’une complication inhabituelle de la vaccination par le
BCG chez un bébé exposé in utero à l’infliximab, la maman ayant reçu 10 mg par kg d’infliximab toutes les 8
semaines pendant la totalité de la grossesse. Ce bébé, né en bonne santé, avait été vacciné par le BCG à l’âge
de 3 mois. Son état de santé s’était alors détérioré jusqu’à son décès à 4 mois et demi. Une autopsie n’avait
pas révélé d’anomalies en dehors de la présence de plusieurs granulomes inflammatoires tuberculeux
correspondant à un BCG disséminé (rappelons que cette complication du BCG est observée habituellement
chez des patients immunodéprimés et que la vaccination par le BCG est contre indiquée chez les patients
recevant un traitement immunosuppresseur).
Les anti-TNF alpha (étanercept [ENBREL®], infliximab [REMICADE®], adalimumab [HUMIRA®],
certolizumab [CIMZIA®], golimumab [SIMPONI®]), en raison de leurs effets immunosuppresseurs, favorisent
(nous le savons) le risque infectieux, notamment tuberculeux. Les anti-TNF alpha traversent par ailleurs le
placenta. Ce transfert a lieu en partie au 2ème trimestre de la grossesse et s’accentue au 3ème trimestre. La
bibliographie rapporte la persistance de concentrations non négligeables d’anti-TNF alpha chez les bébés
dont les mamans ont été traitées par ces produits au 2ème et/ou au 3ème trimestre de grossesse (2-5). Avec
l’infliximab utilisé au cours du 3ème trimestre de grossesse, ont même été observées chez le nouveau-né, le
jour de la naissance, des concentrations d’infliximab plus élevées que chez la maman. Les délais mesurés
dans ces études pour que les taux plasmatiques deviennent indétectables chez le nouveau-né sont de 2 à 7
mois. C’est l’immaturité du système réticulo-endothélial du nouveau-né qui serait à l’origine de ce retard
d’élimination.
Ces éléments ont amené certains auteurs à recommander d’interrompre le traitement par anti-TNF
alpha aux 2ème et 3ème trimestres de la grossesse. Ceci reste cependant très controversé en raison de l’impact
délétère des poussées de maladie inflammatoire intestinale chronique sur la grossesse. D’autres équipes
recommandent donc, si cela bien sûr s’avère possible, d’envisager la dernière injection maternelle au début
du 3ème trimestre de la grossesse. Quelle que soit la période de la dernière injection, il est admis, compte tenu
de l’ensemble de ces données, que les bébés de mères traitées par anti TNF-alpha doivent être considérés
comme « immunodéprimés » pendant les 6 mois qui suivent cette dernière injection maternelle, vie foetale
comprise. Il est donc officiellement déconseillé, dans le RCP des anti-TNF alpha, d’administrer des vaccins
vivants à des nourrissons exposés in utero à ces produits, dans les 4 à 6 mois qui suivent la dernière perfusion
administrée à la mère au cours de la grossesse (délais en fait variable selon les molécules).
(1) J Crohn’s Colitis. 2010 Nov;4:603-5.
(2) Am J Gastroenterol. 2011 Feb;106:214-23.
(3) BMC Med. 2013 Jul 31;11:174.
(4) Clin Gastroenterol Hepatol. 2006 ;4:1255-8.
(5) Gastroenterolgy. 2007 ;132 :A144.
Si vous observez un effet indésirable grave et/ou inattendu ou si vous désirez un renseignement sur un médicament :
N’hésitez pas à nous contacter :
 : 03-20-96-18-18
 : 03-20-44-56-87
 : pharmacovigilance@chru-lille.fr
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Littérature
Dans les brèves n° 42 (octobre-décembre 2013), nous avions fait part des résultats d’une étude (1) qui mettait en
évidence un risque d’hémorragie du post partum (HPP) plus élevé chez les femmes traitées par un antidépresseur IRS
(inhibiteur de la recapture de la sérotonine) au moment de l’accouchement : RR de 1,47 (IC95% : 1,32-1,58) par rapport
à des femmes non traitées. Nous avions alors souligné la nécessité d’une confirmation des résultats par d’autres
études.
En octobre 2014, une étude prospective suédoise sur le même sujet a été publiée (2), réalisée à partir de 39954
femmes enceintes incluses entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2011 à l’hôpital universitaire de Karolinska lors
de leur 1ère visite anténatale (ayant eu lieu à la fin du 1er trimestre de grossesse ou au plus tard au début du 2ème
trimestre). Dans cette population, 500 femmes prenaient un IRS. Les auteurs ont stratifié l’analyse des données sur les
complications obstétricales (placenta praevia, acreta etc..) et chirurgicales (césarienne, accouchement par voie basse
instrumental etc…) qui augmentent le risque de survenue d’une HPP.
L’analyse des résultats montre que le risque de développer une HPP chez les femmes ayant accouché par voie basse
sans complication est 2,6 fois plus important en cas d’exposition aux IRS (OR : 2,6;IC 95%:2,0-3,5). Si l’on tient compte
de la totalité des naissances (accouchement par voie basse et intervention chirurgicale), le risque de développer une
HPP dans le groupe exposé aux IRS est 2,3 fois plus important (OR : 2,3;IC 95% :1,8-2,9).
La physiopathologie de la survenue de ces saignements serait due à la déplétion plaquettaire en sérotonine, liée à une
inhibition de sa recapture par les IRS au niveau des plaquettes.
Cette nouvelle étude, prospective, corrobore donc les résultats des études précédentes. Même si elle ne précise pas les
stades de grossesse pendant lesquels les femmes ont pris leur IRS, ses auteurs estiment, d’après les données d’une
étude néerlandaise (3), que 90 % des femmes qui sont traitées à la fin du 1er trimestre par IRS poursuivent leur
traitement jusqu’à l’accouchement. Ces nouveaux éléments pourraient amener à considérér désormais les patientes
enceintes traitées par un IRS en fin de grossesse comme à risque de développer une HPP.
(1) BMJ 2013 Aug21 ;347 :f4877
(2) J Thromb Haemost 2014;12:1-7
(3) Eur j Clin Pharmacol 2006;62:863-70
Cotrimoxazole, un risque cardiaque en association aux IEC ou ARAII ?
Une étude cas-témoins (1) met en évidence, chez des patients traités par des inhibiteurs de l’enzyme de conversion
(IEC) ou par des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARAII), une augmentation du risque de décès par mort
subite dans les 7 jours qui suivent la mise en place d’un traitement par cotrimoxazole (BACTRIM®).
Pour rappels :
– Le cotrimoxazole associe deux antibiotiques : le sulfaméthoxazole (un sulfamide antibactérien) et le
triméthoprime (une diaminopyrimidine inhibitrice de la dihydrofolate réductase). Le triméthoprime, contenu
dans le cotrimoxazole, présente des similitudes structurales et pharmacologiques avec l’amiloride, diurétique
épargneur du potassium. Aux doses utilisées de triméthoprime en thérapeutique (320 mg par jour) et chez des
patients ambulatoires, celui-ci provoque une augmentation moyenne de la kaliémie de 0,36 mmol/L, et 6 % des
patients présentent une hyperkaliémie (kaliémie supérieure à 5,4 mmol/L).
– Les IEC et ARAII sont à l’origine d’une augmentation de la kaliémie chez environ 10 % des patients traités et le
risque d’hyperkaliémie est majoré chez les patients associant plusieurs thérapeutiques susceptibles de modifier
la kaliémie (2).
Cette étude, réalisée à partir d’une base de données des prescriptions médicamenteuses de l’Ontario et des bases de
données d’admissions hospitalières du même Etat au Canada a inclus, entre le 1er avril 1994 et le 1er janvier 2012,
1 601 542 patients âgés de plus de 66 ans et traités par IEC ou ARAII. Chaque cas a été apparié avec 3 ou 4 témoins de
même âge, même sexe, même état fonctionnel rénal, présence ou non d’un diabète. La survenue d’une mort subite
dans les 7 jours suivant la mise en place d’un traitement antibiotique par cotrimoxazole, ciprofloxacine, norfloxacine,
nitrofurantoïne ou amoxicilline a été recherchée dans cette population (l’amoxicilline étant considérée comme témoin
car elle n’engendre pas d’hyperkaliémie et n’est pas associée, contrairement à certaines quinolones, à des
augmentations de QT et/ou torsades de pointes).
Au total, 39 879 patients sont décédés d’une mort subite pendant la durée de l’étude et 1110 de ces décès sont
apparus dans les 7 jours suivant la mise en place d’un traitement antibiotique. L’analyse de ces décès révèle que le
cotrimoxazole est associé à une élévation du risque de mort subite par rapport à l’amoxicilline (OR : 1,38 [IC 95% (1,09-
1,76)]).
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Compte rendu de la 4ème journée de Pharmacovigilance
Cette année encore, vous étiez nombreux à assister à notre journée de Pharmacovigilance. Le thème retenu en
2014, intitulé Pharmacovigilance et Dermatologie, a été animé avec talent par les dermatologues du CHRU (A.
Bonnevalle, E Delaporte, D Staumont) qui nous ont fait profiter, avec pédagogie, de leur expérience clinique et de la
remarquable iconographie qu’ils ont accumulée.
Lors d’une présentation globale des différentes formes cliniques de toxidermies, il a été rappelé que la peau et les
muqueuses sont le principal organe cible des médicaments et que 1 à 3 % de nos patients prenant des
médicaments seront touchés par un évènement indésirable dermatologique. Si 90 % des toxidermies sont
heureusement sans gravité, 10 % sont malheureusement sévères et parfois même mortelles. Les toxidermies
peuvent prendre des formes cliniques variées regroupant les exanthèmes maculo-papuleux, l’urticaire et l’angiooedème,
les pustuloses exanthématiques aiguës généralisées (PEAG), les réactions de photosensibilité, les purpuras
vasculaires (vascularites), les érythèmes pigmentés fixes (EPF) et les nécrolyses épidermiques toxiques (syndrome
de Lyell et Stevens Jonhson).
La part des causes médicamenteuses dans chacune de ces formes cliniques de toxidermie est très variable. Elle
concerne 100 % des EPF, plus de 80 % des nécrolyses épidermiques toxiques, 50 à 80 % des éruptions maculopapuleuses,
10 % des urticaires aiguës et moins de 10 % des érythèmes polymorphes.
Les réactions de photosensibilisation et le DRESS syndrome (Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic
Symptoms) ont ensuite été plus spécifiquement détaillés.
Les réactions de photosensibilisation dans lesquelles le médicament se comporte comme un chromophore sont
caractérisées par des réactions de photoxicité (réaction directe entre les UV et le chromophore à l’origine d’une
réaction inflammatoire) et des réactions de photoallergie (réaction immunitaire déclenchant une réaction
allergique à type d’eczéma).
Les réactions de photoxicité peuvent se produire dès la 1ère prise du médicament et sont dues en grande partie à
l’exposition aux UVA, ce qui explique que l’on puisse réagir même derrière une vitre ! Les familles de médicaments
responsables sont nombreuses et bien identifiées. Parmi les principales sont retrouvées les cyclines, les
fluoroquinolones, les phénothiazines et les AINS (kétoprofène, naproxène). L’évolution peut se faire vers une
phototoxicité rémanente, récidivant à distance de la réaction et dans les mêmes circonstances déclenchantes, alors
que l’exposition au médicament a disparu (fréquente avec les phénothiazines, rare avec le kétoprofène).
La photoallergie nécessite quant à elle une sensibilisation préalable et va se produire après une dizaine de jours de
traitement en cas de 1er contact avec le médicament. L’évolution se fait vers la desquamation, avec une disparition
en quelques jours, mais peut aussi donner lieu à une photosensibilisation rémanente ou persistante. Les
La ciprofloxacine est elle aussi associée à une légère augmentation du risque de mort subite en début de traitement
en raison, d’après les auteurs, de son effet sur l’allongement de l’espace QT mais ce risque n’est pas retrouvé avec
la norfloxacine et la nitrofurantoïne.
Concernant le critère secondaire de l’étude, représenté par la survenue d’une mort subite dans les 14 jours qui
suivent la mise en place du traitement, seul le cotrimoxazole montre une association significative. Au total, ces
résultats établissent qu’il y a 3 morts subites pour 1000 prescriptions de cotrimoxazole contre 1 pour 1000
d’amoxicilline chez les patients recevant un IEC ou un ARAII. Les auteurs attribuent ces décès à la survenue, parfois
rapide, d’une hyperkaliémie pouvant engendrer une arythmie fatale. Cette étude présente des faiblesses
méthodologiques (étude rétrospective, absence de données sur l’indication des traitements, l’observance des
patients, absence des résultats d’analyses biologiques, posologie des traitements non renseignées etc…) et ses
résultats doivent être interprétés à notre avis avec prudence, ne serait-ce que par le faible Odd’s Ratio retrouvé. Il
n’en reste pas moins vrai qu’elle nous rappelle qu’il convient, dans notre pratique, de garder en mémoire la liste des
médicaments susceptibles d’augmenter la kaliémie et dont l’association doit être dans la mesure du possible évitée
ou tout au moins surveillée. Cette liste comporte : les sels de potassium, les diurétiques épargneurs du potassium,
les IEC et les ARAII, les AINS, les héparines non fractionnées ou de bas PM, les immunosuppresseurs comme la
ciclosporine et le tacrolimus …et bien sûr le triméthoprime.
(1) BMJ. 2014 Oct 30 ; 349:g6196
(2) Eur J Clin Pharmacol. 2014 Feb;70(2):215-23
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médicaments responsables de photoallergie sont, là aussi et pour ne citer que les plus fréquents, les quinolones, les
phénothiazines, les fibrates, les AINS.
Des tests d’explorations cutanées peuvent être mis en oeuvre pour identifier la molécule responsable en cas de
difficulté diagnostique. Lors de la prise en charge des patients ayant présenté une réaction de photosensibilisation, il
est impératif de penser aux réactions croisées possibles ou aux co-sensibilisations : par exemple kétoprofène avec
les fibrates, oxybenzone, fentichlor et octocrylène (composant des crèmes solaires), piroxicam avec le thiomersal.
Le DRESS syndrome est une toxidermie sévère qui peut être fatale en raison d’atteintes viscérales pouvant mettre
en jeu le pronostic vital dans 10% des cas. Il se différencie des autres toxidermies par un délai de survenue long
entre la première prise médicamenteuse et les premiers symptômes (2 semaines à 3 mois en moyenne). Son
évolution est lentement régressive après l’arrêt du médicament, avec des poussées évolutives possibles, même à
distance de l’arrêt du traitement.
Le diagnostic de DRESS repose sur un ensemble de critères comportant une éruption cutanée survenant au moins
10 jours après l’introduction du médicament (sauf en cas de réintroduction où le délai de survenue chez une
personne sensibilisée peut être très bref), une hyperthermie supérieure ou égale à 38.5°C, au moins une atteinte
viscérale (hépatite, atteinte pulmonaire, atteinte rénale ou cardiopathie) et au moins une anomalie biologique
(éosinophile sanguine, syndrome mononucléosique, hyperlymphocytose ou PCR HHV6 +).
La physiopathologie du DRESS est originale et fait intervenir une coopération virus/médicament ce qui explique le
profil évolutif de ce syndrome (poussées lors des réactivations virales successives même après arrêt du
médicament). Des sujets à risque sont identifiés : patients greffés, immunodéprimés (VIH), en réanimation…
Les médicaments en cause sont, pour ne citer que les plus fréquents, certains antiépileptiques, l’allopurinol, les
sulfamides, certains antibiotiques (vancomycine, minocycline, amoxicilline, ampicilline/sulbactam). Une exploration
allergologique avec des patchs tests est possible pour identifier la molécule responsable mais celle-ci doit se faire à
distance de l’évènement aigu (plus de 6 mois après).
Il n’existe pas à ce jour de consensus en ce qui concerne le traitement et des études cliniques sont en cours. L’arrêt
du médicament doit être immédiat en portant une attention aux sensibilisations croisées. Une corticothérapie
locale ou systémique (indispensable en cas de DRESS sévère) peut être mise en place, ainsi que l’administration
d’immunoglobulines polyvalentes (à prescrire au moins 24-48h après la mise en route de la corticothérapie
systémique). La place des antiviraux (ganciclovir, cidofovir) est encore à ce jour discutée.
L’exploration des toxidermies se fait par des tests cutanés. L’objectif étant de prouver l’existence d’une allergie et
donc d’identifier spécifiquement (particulièrement en cas de polymédication) et de contre-indiquer à bon escient le
médicament responsable, de vérifier l’absence de réaction croisée et de trouver une solution de remplacement.
Pour mettre en oeuvre ces tests, une étude minutieuse du dossier du patient (en portant une attention particulière à
la chronologie précise d’introduction des différents traitements par rapport à la survenue des réactions indésirables)
permettra de définir s’il s’agit d’une réaction d’hypersensibilité retardée (HSR) ou immédiate (HSI). Les tests utilisés
sont des patchs tests, des pricks tests et l’intradermoréaction (IDR). Les patchs tests ne sont effectués qu’en cas
d’HSR, 6 à 10 semaines après l’accident aigu (sauf dans le DRESS où le délai doit être supérieur à 6 mois). Ils peuvent
être réalisés en milieu spécialisé en cas de toxidermie sévère mais sont contre indiqués chez les patients sous
corticoïdes (topiques ou généraux). La lecture de ces tests est codifiée et se fait au bout de 48, 72 ou 96 heures, de 8
jours pour l’ HSR, et de 20 à 40 minutes pour l’HSI.
Si les résultats des tests sont négatifs, peuvent être envisagés alors des tests de réintroduction des médicaments en
milieu hospitalier. Ces tests sont bien sûr contre indiqués dans les toxidermies sévères (PEAG, nécrolyse
épidermiques toxiques, DRESS, choc anaphylactique).
Enfin, les autres interventions de cette journée ont été consacrées, à l’aide d’exemples issus de notifications
particulièrement intéressantes faites au CRPV, à la présentation de quelques effets indésirables non
dermatologiques des médicaments utilisés en dermatologie, et aux actualités de pharmacovigilance en
dermatologie. L’ensemble de ces présentations peut être consulté sur notre site. (pharmacovigilance-npdc.fr)
Nous vous donnons rendez-vous pour la prochaine journée de pharmacovigilance en octobre 2015 où nous
espérons certes retrouver nos habitués, mais aussi de nombreux nouveaux convertis !